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Le Paradoxe
16 février 2013

Antoine de Saint-Exupéry : Lettre à sa mère Marie

J’aime ça, le vent et – en avion – la lutte, le duel avec la tempête.
Le vert me manque, le vert est une nourriture morale, le vert entretient la douceur des manières et la quiétude de l’âme. Supprimez cette couleur de la vie, vous deviendrez vite sec et mauvais.
Vous êtes ce qu’il y a de meilleur dans ma vie.
Vous ne pouvez imaginez ce calme, cette solitude que l’on trouve à 4000 mètre en tête à tête avec son moteur.
Je déteste ces gens qui écrivent pour s’amuser, qui cherchent des effets. Il faut avoir quelque chose à dire.
La vie courante a si peu d’importance et se ressemble tant. La vie intérieure est difficile à dire, il y a une sorte de pudeur. C’est si prétentieux d’en parler.
Dites-vous, ma petite maman, que vous avez peuplé ma vie de douceur comme personne n’aurait pu le faire. Et que vous êtes le plus « rafraîchissant » des souvenirs, celui qui éveille le plus
en moi.
Ces coulisses du Sahara ornées de quelques figurants m’ennuient comme une banlieue sale.
La chose la plus « bonne », la plus paisible, la plus amie que j’aie jamais connue, c’est le petit poêle de la chambre d’en haut à Saint-Maurice. Jamais rien ne m’a autant rassuré sur
l’existence.
Ce qui m’a appris l’immensité, ce n’est pas la voie lactée, ni l’aviation, ni la mer, mais le second lit de votre chambre.
Je ne puis penser à mon coin de terre sans une grande faim d’être là-bas.
C’est un drôle d’exil d’être exilé de son enfance.
J’ai un petit, tout petit désir de me marier mais je ne sais pas avec qui.
Je fais un métier d’aviateur, d’ambassadeur et d’explorateur.
C’est mon rôle ici d’apprivoiser
Je ne suis pas sûr d’avoir vécu depuis l’enfance.
On sent l’immense besoin de revenir pour protéger et abriter, et l’on s’arrache les ongles contre ce sable qui vous empêche de faire votre devoir, et l’on déplacerait des montagnes.« Je suis
ravi, enchanté, aux anges et si je vous avais près de moi je serai au troisième ciel. Écrivez-moi bien souvent, vos lettres sont un peu de vous« . . « Et je rêve aussi beaucoup à vous et me
souviens d’un tas de choses de vous quand j’étais gosse. Et cela me navre le cœur de vous avoir si souvent fait de la peine. Je vous trouve si exquise, si vous saviez, maman, et la plus
subtile des « mamans » que je connaisse. Et vous méritez tant d’être heureuse

Lettres

 

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